Comprendre l’évolution du monde et s’y associer par l’astrologie

Ferdinand David est un astrologue chevronné autant que discret. Auteur de nombreux ouvrages, il est à notre sens un des derniers grands penseurs vivant de l’astrologie, c’est à dire un de ces derniers « irréductibles » qui proclame – à juste titre – que l’astrologie, au delà de sa dimension technique, constitue un précieux outils de réflexions et de philosophie, de spiritualité aussi.

C’est avec plaisir que nous publions donc l’article suivant, lequel constitue une réflexion de fond sur le sens de l’évolution. De son propre aveu, il doute que « cela intéresse beaucoup les gens » tant « le milieu astrologique actuel ne me semble pas très porté ni au dialogue ni à la réflexion ». Devant reconnaitre que cela est malheureusement vrai, nous ne désespérons pourtant pas du contraire…

Existe-t-il une vérité du monde ? Un sens à l’évolution ?

Existe-t-il un sens à l’évolution ? En quoi une approche de la connaissance de cette vérité et de ce sens serait-elle utile à la bonne gestion de notre existence, individuellement et collectivement ? Autrement dit, l’observation du monde est-elle susceptible de nous délivrer les vérités dont chaque individu et chaque collectivité ont besoin pour bien gérer leur existence ?

Par « monde », entendons l’ensemble de tout ce qui existe. Nous laisserons de côté ce que nous appelons habituellement le Cosmos, l’Univers, pour nous en tenir au seul monde de notre planète Terre.

Par « vérité », entendons un jugement qui ressort de l’observation que chacun peut faire des dénominateurs communs observés entre les processus de la vie des hommes et ceux que nous pouvons observer comme constants dans ce qui existe en dehors de nous, et qui existait avant l’arrivée sur Terre de l’être humain. Par exemple, peut-on faire un rapprochement significatif et instructif pour nous entre les fruits qui couronnent chaque cycle annuel de la vie de l’arbre, et les « fruits » que l’homme produit par son activité (« c’est le fruit de son travail ») ? Autre exemple, peut-on faire un rapprochement significatif et instructif entre l’arbre bien enraciné, bénéficiant ainsi de bons échanges nutritifs, donc sain, solide et productif, et l’homme bien « enraciné » dans son milieu, dans sa culture, dans ses connaissances, enracinement qui nourrit bien son corps comme son esprit, et sans lequel il demeure fragile et peu productif (« il a les pieds sur terre ») ? De même nous observons que, dans l’arbre par exemple, nous retrouvons à la fois la Matière, d’une part, et, d’autre part, la Vie qui l’anime et qui commande son développement. L’homme aussi est fait de matière et de vie. Nous sommes nés de la même Vie qui, avant nous, avait fait naître ce qui nous a précédé et qui a permis notre arrivée et notre évolution. La Vie est invisible mais essentiellement créative ; nous n’en percevons que les manifestations, toujours variées selon son support matière ; manifestations qui nous permettent de conclure à la progressive réalisation d’un plan de développement poursuivi depuis le chaos originel. L’évolution du monde va quelque part ; elle ne retourne jamais en arrière. Tout va « quelque part » ; ne dit-on pas : « Comment allez-vous ? Je vais bien, merci », « C’est un jeune qui ira loin ». C’est le verbe aller. Nous allons quelque part. Tout va quelque part. En fonction du passé de cette évolution et de sa logique, il faut essayer de chercher vers quoi nous allons ; c’est alors que nous entreverrons le sens de la Vie. Et le sens est encore une idée de direction, de but. Le sens de notre marche est inscrit dans l’Univers et sans doute aussi dans notre inconscient… qui est la réplique de la semence qui nous a fait naître.

Notre champ d’observation est immense

Notre champ d’observation est immense, tant de choses ont été réalisées depuis le lointain Big Bang du chaos originel voici 15 milliards d’années, et depuis les 4,5 milliards d’années d’existence de notre planète Terre née de ce chaos originel. L’Homme est jeune en regard de cette naissance de l’Univers et de celle de notre planète. L’homme actuel dit homo homo sapiens (l’homme moderne) remonterait à seulement -35 000 ans, il succédait à l’homme dit de Neandertal qui serait apparu vers -100 000 ans. L’homo habilis remonterait à 2 ou 3 millions d’années. L’agriculture débuta seulement vers 8 000 avant notre ère, elle allait de pair avec la sédentarisation. L’évolution de l’homme est considérable et unique par rapport au monde végétal et au monde animal, et elle est de plus en plus rapide ; l’histoire contemporaine nous montre plusieurs grandes étapes… vite remises en question par de nouvelles. Et nous sommes actuellement en pleine mutation. Autant de raisons qui nous imposent de tenter de comprendre le sens de cette évolution.

Ce qu’il faut remarquer, car c’est là le plus significatif, c’est qu’à partir du chaos originel la construction du monde en soit arrivée, du moins sur Terre, à l’homme, à l’homme d’aujourd’hui capable de penser, capable de penser l’évolution de ce monde et de se penser, de s’interroger lui-même, de chercher à comprendre pourquoi il est là, pourquoi il a fallu 4 milliards d’années pour qu’il apparaisse. Sans doute, sans cette évolution progressive allant du chaos à l’humain en passant par le minéral, le végétal et l’animal, l’homme ne posséderait ni liberté, ni capacité à penser, ni intelligence créatrice. L’évolution poursuit une finalité et elle s’en donne les moyens. Insistons : l’homme ne s’est pas créé lui-même ; c’est la Vie qui l’a créé. Mais qu’est-ce que la Vie ?

La construction du monde ressemble fort à l’activité de nos entreprises. Qui en est le patron ?

La construction du monde ressemble fort à l’activité de nos entreprises, mais on ne peut concevoir une entreprise sans une intelligence à sa tête, intelligence qui a démarré l’entreprise, défini sa vocation et anime et contrôle son développement. Et voici posée la grande et éternelle question : qui à l’origine de l’Univers ? Qui à l’origine de cette entreprise titanesque ? Depuis que l’homme pense, il pose et se pose cette question. Il rêve de pouvoir dialoguer avec ce Maître pour le questionner, voire l’infléchir, voire obtenir une part de son pouvoir par délégation. Et là nous retrouvons les religions avec le concept de Dieu. Mais l’évangéliste Jean nous avertit: « Dieu, personne ne l’a jamais vu » ; auparavant, Jean avait pris soin de nous dire : « et la vie était la lumière des hommes ». Malgré notre culture chrétienne en Occident, il faut bien comprendre que Dieu demeure un concept abstrait. Certes, il a été « humanisé » par les religions, considéré comme un « Père », comme le Créateur, comme le Maître, etc. mais l’homme est bien incapable d’imaginer ou de définir l’origine de la Vie, donc d’imaginer ce Dieu. Quant à la Vie qui est Lumière pour l’homme, il s’agit des œuvres, des manifestations de la Vie puisque la Vie est invisible pour nous, à la différence des formes multiples de la matière qu’elle habite et anime. Il est donc plus facile, et plus utile, de tenter de comprendre la Vie plutôt que d’en rester au concept abstrait de Dieu. C’est en regardant l’Œuvre accomplie du Créateur que nous parviendrons à comprendre la Vie.

Bien entendu, cette notion de Dieu unique fut un progrès considérable pour l’humanité, une source d’unification, une explication qui permît, imposa même, une morale, une réflexion métaphysique, y compris pour la vie publique. Mais la religion s’attacha trop exclusivement à Dieu et à l’humanité, et pas assez, même pas du tout, au reste de son Œuvre qu’est la Nature (ensemble du règne minéral, végétal et animal). Elle regarda trop l’« âme » de l’homme, et pas assez sa relation avec son environnement. Et l’homme devint un irrespectueux, un prédateur, un exploiteur de cette Nature. On a oublié de lui dire qu’il était issu de cette Nature, qu’il était lié à elle, qu’il ne pouvait survivre sans elle, qu’elle était vivante comme lui. De toute façon, cette notion de Dieu telle qu’elle fut enseignée n’est plus crédible. Nous sommes donc renvoyés à une recherche de la vérité du monde car l’homme a besoin de sens. Il a besoin de connaître quel doit être le sens de sa marche, le sens de la direction qui lui convient.

L’homme a besoin de donner un sens à son existence

Nous voulons comprendre et nous cherchons à comprendre, même malgré nous, car nous savons bien que pour bien vivre, heureux et en bonne santé, nous devons parvenir à comprendre le « jeu » de la Vie, son plan et son savoir-faire, et à nous y associer. L’humanité ne peut faire bande à part. La part de liberté que la Vie accorde ne doit pas nous induire en erreur : l’humanité, dans son ensemble, doit demeurer dans la ligne prévue de la construction du monde. Notre liberté n’est pas totale car l’humanité ne peut détruire ce qui a permis sa naissance et qui la maintient en vie. Nous faisons d’ailleurs actuellement ce constat avec la pollution, mais aussi, d’une façon plus sournoise, avec l’orientation de l’économie qui s’éloigne de plus en plus des conditions d’épanouissement de l’homme. La Vie est Le Maître, invisible pour que notre part de liberté-responsabilité soit entière, mais qui sait nous barrer le chemin lorsque nous nous écartons trop dangereusement de la ligne d’évolution.

Le grand problème de notre époque c’est que nous devons retrouver une vérité du monde, sinon nous retournons à l’état sauvage de l’animal ; autrement dit : c’est le plus fort qui impose sa loi, et sa loi n’est évidemment pas celle de la Vie. Le danger est là. Ne constatons-nous pas aujourd’hui, à la fois, la domination d’une économie visant à créer de puissants groupes financiers (en détruisant ou en rachetant leurs concurrents, ou en émettant des actions) tandis que la Gauche et les Écologistes ne parviennent pas à définir un programme de saine économie, de justice pour tous et de respect de la Nature. Respect de l’Homme, respect de la Nature, respect de la Vie. C’est un tout. Ce n’est pas un hasard si Gauche et Écologistes ont fini par se rencontrer contre un capitalisme sauvage qui exploite l’homme ainsi que la Nature. Quand il n’y a plus de sens, il n’y a plus de projet, ni individuellement ni collectivement, les structures se délitent, le chaos tend à se réinstaller. La Gauche et les Écologistes doivent définir pourquoi une autre économie, pourquoi une autre justice, pourquoi un respect de la Vie. Une saine philosophie doit être réintroduite dans le politique.

Nous avons grand besoin de pouvoir répondre à toutes ces questions car il est évident que l’humanité se trouve aujourd’hui dans l’obligation de s’interroger sur le comment vivre mieux, et comment vivre mieux ensemble. Comment vivre ensemble sans être conduits à un combat sans merci des plus forts contre les plus faibles ? Et les plus forts n’en sortent d’ailleurs pas souvent vainqueurs. L’Occident était le plus fort, et la France plus particulièrement. Mais, hier, les Etats Unis ont dominé, et, demain, ce seront la Chine, l’Inde, le Japon, et, après-demain, ce seront d’autres encore. Ainsi se déroule la vie de l’humanité sur notre planète. Le plus fort contre le plus faible. Le riche contre le pauvre. C’est la loi de l’état sauvage, la loi de l’animal à l’origine de notre espèce humaine ; elle est de règle dans le monde animal, également dans le monde végétal lorsqu’il s’agit de s’accaparer d’un bien qui ne peut être partagé entre tous les individus.

Cette loi du fort contre le faible est très bénéfique pour l’évolution du monde. Elle contraint chacun à vouloir devenir le plus fort, et le combat pour la domination impose au plus fort de devenir encore plus fort, et au plus faible de tout mettre en œuvre pour réduire sa défaite. Tel est le moteur inventé par la Vie pour que le monde croisse en développant toujours davantage de capacités physiques et intellectuelles. Avec l’instinct, la Vie s’est offert la garantie du bon développement matériel de son plan, mais son projet est bien plus ambitieux, et le développement matériel n’est que le socle nourricier pour l’ancrage de la loi d’amour. L’homme doit donc dépasser son instinct de base.

 

Le sens de la vie

 

Comprendre le sens de l’évolution de l’Univers et s’y associer

De ces luttes, l’humanité est née. Et si le monde végétal et le monde animal évoluent lentement, par contre l’évolution de l’espèce humaine est considérable bien que la dernière arrivée sur la planète. Et c’est là, en considérant toute la richesse de cette évolution humaine, toute sa rapidité, toute sa créativité, tout le développement de sa puissance, de sa pensée, que nous pouvons comprendre le sens de l’évolution de l’Univers. Violence et amour sont déjà chez les animaux, et nous les retrouvons pareillement chez l’homme, sauf que chez ce dernier l’amour tend à se développer et à l’emporter de plus en plus sur la violence ; du moins, c’est la grande aspiration chez la plupart des humains. L’homme n’est jamais aussi heureux et aussi créatif que lorsqu’il est « amoureux ». Amoureux, certes de son conjoint, mais aussi amoureux de son travail, de sa terre, de ses bêtes, etc. C’est là un trait du vouloir de la Vie : développer l’amour, de plus en plus. Sans doute, d’ailleurs, le développement du beau, du bon et de l’amour – et les deux premiers peuvent se résumer dans le troisième – représentent l’objectif principal, voire final, de l’évolution de l’Univers. Même la haine est un dérivé de l’amour car on hait ce qui s’oppose à ce qu’on aime. L’amour va de pair avec l’échange puisqu’il est don. L’arbre vit d’échanges par ses racines et par ses feuilles, et nous-mêmes ne vivons que d’échanges : avec l’air, avec la nourriture, avec notre inconscient, avec nos semblables ; l’homme ne peut vivre seul et nous savons bien que la solitude est la pire des épreuves. Mais l’échange est don, c’est la loi. L’arbre, par ses échanges avec la terre et avec l’air, a produit des fruits… qu’il offre à qui en a besoin, ou envie.

Quand l’homme a compris cela, il ne devrait avoir de cesse que d’imiter la Vie. S’associer à son vouloir et à son savoir-faire est donc la grande recette de l’épanouissement humain, la recette du bonheur, individuel et collectif. Cette vérité du monde nous suffit déjà pour définir nos projets, projets qui vont conditionner notre façon de vivre, donc notre santé, notre vie relationnelle, etc.

Jetons un coup d’œil autour de nous, et en nous, et nous comprenons que tout est projet ; le projet des végétaux est de grandir et d’élaborer des fleurs et des fruits. L’homme peut planter un arbre, semer une graine, mais il ne peut faire plus : c’est la Vie qui s’en charge. L’homme semble libre de définir son projet et de mettre en œuvre ce qui le développera, mais c’est méconnaître que dans notre inconscient germe une multitude d’aspirations, et celle de se reproduire n’est pas la moins puissante, ce qui est normal puisque sans reproduction il n’y aurait pas de renouvellement, donc la construction du monde s’arrêterait.

Une même Vie en tout ce qui est

C’est donc bien la même Vie qui est dans tout ce qui existe avec, partout, son même programme et son même savoir-faire : naissance, développement, fleurs, fruits-graines, vieillesse, mort, chacun selon le cycle de son espèce. L’homme a été conçu pour disposer de plus en plus de liberté au fur et à mesure de l’évolution de l’humanité, et même chaque individu peut personnellement développer cette liberté vis-à-vis de son instinct et de son environnement en s’efforçant de comprendre toujours mieux les processus que la Vie développe dans ses créations, afin de pouvoir s’associer à elle et être créatif comme elle. C’est d’ailleurs ainsi que l’homme a pu créer, entre autres, nos nombreuses boissons : vin, cidre, bière,…en associant divers processus naturels. Seulement… s’il refuse d’obéir à la Vie, ou s’il organise son existence en l’ignorant, il ressentira la douleur, physique ou morale, et cette douleur, pour disparaître, exigera une autre façon de vivre, individuelle et collective, plus proche de l’idéal de la Vie. Vaste brassage ! Invisible, discret, mais efficace. Chaque semence contient la semence d’origine, la semence du monde. Et, avec l’homme, nous pouvons même dire que son esprit est également fécondateur des autres esprits – le professeur féconde l’esprit de ses élèves -. Nous pouvons dire que le monde entier, passé et futur, est en chacun de nous et nous conditionne par le biais discret de nos aspirations, affinités, répulsions, etc. C’est comme si la Vie agissait en double, en dualité : à la fois sur la matière et sur la pensée ; la pensée agit sur la matière mais la matière agit également sur la pensée : joie et tristesse, plaisir et douleur, dialectique de la dualité.

Il existe donc une logique de l’évolution de l’Univers servie par des processus universels ; nous pouvons donc en dégager des lois pour comprendre nos propres processus, les réorienter si besoin et vivre mieux, individuellement et collectivement. L’insatisfaction ne disparaîtra pas car elle reste le moteur de l’évolution : elle aura un sens, c’est tout différent, et, au lieu de la subir, nous pourrons la gérer.

Comment utiliser nos observations de la nature pour mieux vivre ?

Disons tout de suite que cette observation-compréhension est devenue difficile pour le citadin qui ne possède plus de proches ascendants véritables ruraux, car admirer la nature est une chose, percevoir et comprendre la vie qui l’anime en est une autre ; il faut vivre au milieu des choses pour les comprendre. Regarder la nature c’est embrasser une masse considérable de symboles qu’il faut faire parler les uns après les autres, et pour les faire parler il faut comprendre la Vie qui les anime. Mais chacun peut observer à sa façon, en fonction de sa sensibilité, de sa culture et de son rythme. Et chacun retirera de son observation ce qu’il est préparé à comprendre. Nous allons prendre quelques exemples.

Nous avons déjà évoqué ci-dessus la vie de l’arbre, son enracinement, sa croissance, ses fleurs et ses fruits. Regardons la vigne, c’est une liane envahissante d’une très grande vitalité ; elle a besoin d’être maîtrisée, taillée, sinon elle « gaspille » son énergie en développant des tentacules d’une longueur surprenante, et ses grappes de raisin seront alors ridicules de petitesse : étalement, gesticulation, bavardage, gaspillage… l’homme ne doit pas éparpiller ses énergies dans de multiples directions ; il doit se concentrer ; on ne peut toucher à tout. Il y a un temps pour explorer et un temps pour réaliser. Tout l’art de l’éducation est là.

Prenons l’exemple de la greffe. Elle consiste à insérer sur un sujet vigoureux un greffon pris sur un arbre que l’on veut reproduire tout en le faisant bénéficier de la puissante vitalité du porte-greffe. C’est un mariage, un accouplement pour une bonne production. Le paysan veillait toujours au bon choix de ses animaux reproducteurs. Chez les humains, le mariage entre consanguins est toujours à risque pour la progéniture. L’éducation des enfants n’est-elle pas aussi une sorte de greffe du meilleur des ascendants et des enseignants sur la jeune personnalité de l’enfant. Il est évident que le symbolisme des fleurs se retrouve dans les toilettes et le maquillage des femmes. Le rôle de la fleur est d’attirer l’abeille ou le bourdon pour qu’elle soit fécondée. Qui sait si l’arbre ne symbolise pas la théorie de la réincarnation : à l’automne, il perd ses feuilles et ne conserve, dépouillé, que son squelette, puis, au printemps suivant, il retrouve une nouvelle vie avec le développement des bébés-bourgeons, en même temps sa structure (son squelette) accomplit un plus de croissance. Nos « hivers » dans l’au-delà nous permettraient d’assimiler le fruit des expériences de l’existence accomplie, et de renaître enrichis de cette dernière à l’endroit et dans le temps qui nous conviendraient. L’homme aussi possède un squelette. Prenons les tempêtes de vent. Elles désencombrent les arbres du bois mort qui les affaiblit et elles abattent les moins résistants. Nous aussi nous avons besoin de nous secouer de temps en temps, et de secouer les autres. « Débarrasse-toi de tout cet inutile qui t’encombre ! » Et l’orage ? Brutal, certes ; montant depuis l’horizon, envahissant notre ciel, causant parfois des dégâts, mais il rééquilibre le ciel et la terre. L’orage nous fait penser aujourd’hui aux difficultés, toujours violentes, de la mondialisation (violence en économie, violence en immigration…). Mais aussi à nos orages en famille, à nos orages amoureux… Puis au calme si agréable après les orages. Les orages ne sont jamais immédiats : ils montent de l’horizon. Tous les orages. N’oublions pas les saisons. Nos printemps, nos étés, nos automnes, nos hivers sont bien à l’image de ceux de la nature : on ne peut plus guère parler de nos fleurs ni de nos fruits quand notre hiver s’est bien installé. Et la jeunesse connaît toujours l’exubérance des printemps, et la beauté de ses fleurs. Nous sommes pareillement en affinité avec ruisseaux, rivières et fleuves. Ils drainent le minuscule et l’individuel de ci et de là pour former la masse des océans. Les grands touts sont faits d’apports individuels, que ce tout soit construction matérielle ou de l’esprit, nation ou civilisation. Tout le monde connaît le proverbe « Les petits ruisseaux font les grandes rivières ».

Chacun de nous est à lui seul toute la nature

Chacun de nous est à lui seul toute la Nature ; tous les temps et tous les processus de la vie de la nature sont en nous ; nous avons été construits par les mêmes lois universelles qui ont formé les règnes nous précédant. Notre corps est construit et entretenu par notre capacité à assimiler ce qui pousse naturellement sur la terre ; nous sommes en affinité avec, sans quoi nous ne pourrions pas nous en nourrir. Les produits résultant de manipulations chimiques ne peuvent donc nous convenir. La Vie invisible agit en nous et par nous, tout comme, pareillement invisible, elle agit dans la nature et par elle. Nous comprenons ainsi pourquoi une nourriture naturellement saine entretient, voire rétablit, une bonne santé, et pourquoi certaines plantes peuvent guérir certaines maladies, mais, également, pourquoi une part de ce que furent nos ascendants se retrouve en nous.

« La Vie est la lumière des hommes », écrivit l’évangéliste Jean dans son célèbre Prologue, et pourquoi cela ? C’est encore Jean, le philosophe, qui nous le précise : « Et le Verbe s’est fait chair ». Le Verbe, c’est la Pensée, c’est la Parole, c’est le Projet qui précède et préside toute œuvre. Le philosophe Jean parle de la Pensée-Projet qui provoqua la naissance du monde, et il nous dit que ce Verbe s’est fait chair ; quel monumental raccourci ! la chair c’est la matière ; autrement dit, la Pensée-Projet-Vouloir crée toutes les formes de matière existantes et les anime. Jean ne pouvait aller au-delà : « Dieu, personne ne l’a jamais vu » précise-t-il. Il nous dit que « Au Commencement était le Verbe ». mais il ne nous renseigne pas sur qui était à l’origine de ce Verbe ; il dit que ce Verbe était Dieu, ce qui renvoie purement et simplement au constat de l’impuissance de l’homme à pénétrer au-delà du Big Bang d’origine. Personne n’a fait mieux depuis. Il est évident que nous constatons bien une logique constante de l’évolution de l’Univers depuis son origine qui nous autorise à considérer que ce Verbe à l’origine contenait le projet de tout ce qui est et sera. En reconnaître l’existence dans la Nature nous conduit donc à mieux comprendre ce qui se passe en nous ; notre liberté est, en effet, limitée, encadrée par le contenu de ce Verbe…

Le Grand Livre de la Nature existe donc bien. Il est là pour nous enseigner, pour nous dire comment nous avons été construits, pour nous enseigner notre « nature » d’homme. Ce sont les lois universelles qui ont façonné la Nature, et ce sont les mêmes qui ont façonné l’homme, c’est pourquoi nous ne pouvons que vivre selon ces mêmes lois telles que nous pouvons les retrouver et les comprendre dans ce Grand Livre. Imiter la nature créatrice, oui. La contrefaire, non. Notre organisme ne nous le permet pas. Individus et sociétés doivent évoluer en écoutant le Verbe.

 

Soi, la nature

 

L’Évolution : jusqu’où ? Bienfaits, difficultés, pièges

Jusqu’où ira l’évolution du monde ? Évidemment nous ne pouvons le savoir, mais nous pouvons tenter de comprendre l’esprit de son développement pour nous accorder à lui et nous mettre en phase avec son objectif au lieu de nous faire rappeler à l’ordre, individuellement et collectivement, quand nous l’avons trop ignoré ou quand nous nous y sommes opposés. Que pouvons-nous observer si nous regardons cette évolution depuis les temps les plus anciens de notre planète ? Assurément c’est le développement de la liberté. Il y en a bien peu dans le règne minéral où cailloux et grains de sable ne se meuvent que par la pluie et le vent. C’est déjà mieux dans le règne végétal avec les graines dispersées par le vent. Dans le règne animal, cet embryon de liberté-mobilité s’est perfectionné : l’animal peut se déplacer pour rechercher sa nourriture préférée, pour fuir le danger, pour se reproduire, etc. Les animaux ont même un minimum d’organisation sociale au sein de chaque espèce. Bien entendu, la fantaisie est pratiquement exclue chez les animaux, l’instinct règle l’existence de chaque espèce ; il y a donc répétition et très peu de créativité.

Avec l’espèce humaine, la liberté fait un bond en avant prodigieux. Nous pourrions dire que la Vie savait fort bien ce qu’elle faisait en développant une créativité capable de générer de la liberté. Toutefois ce développement de la liberté, devenu individuel chez l’homme, devait être contrôlé afin que l’évolution générale du monde n’en soit pas perturbée et que l’individu ne soit pénalisé, perdu irrémédiablement par elle. Liberté et contrôle sont cependant en contradiction, et la Vie dut résoudre cette difficulté afin que la diversité créative espérée par cette liberté puisse se développer normalement. Car il semble bien qu’après la liberté ce soit la créativité que la Vie cherche à développer. Suite logique, puisque sans liberté il ne peut y avoir de créativité diversifiée, mais la liberté engendre la diversité de la créativité.

La Vie voulait donc associer liberté et créativité au niveau de l’espèce, comme pour le règne animal, mais aussi au niveau de chaque individu. Les parents actuels peuvent imaginer la difficulté de cette tâche avec l’éducation de leurs enfants. Toutefois, les parents s’expriment, ils encouragent ou interdisent ou mettent en garde. La Vie ne parle pas. Si elle parlait de quelque façon, la liberté serait considérablement réduite, voire détruite, et la créativité avec. La Vie inventa donc un système génial : satisfaction de l’individu ou souffrance du même, avec révolte inutile contre la sanction. Satisfaction quand l’individu – ou la collectivité – use de sa liberté en vivant et en créant dans l’esprit de l’évolution. Souffrances quand l’individu – ou la collectivité – use de sa liberté en vivant et en créant dans un esprit contrariant trop l’évolution. Encore faut-il que l’individu – ou la collectivité – développe une suffisante connaissance de l’art de vivre puisque l’ignorance ne peut accroître la liberté. L’individu – ou la collectivité – pourraient encore choisir, face à la difficulté du vivre, la stagnation ; ne rien faire, n’avoir aucune ambition. La Vie l’a prévu, et elle a voulu que son propre « moteur » soit dans chaque individu : ce sont nos aspirations supérieures, notre besoin d’être reconnu, d’être respecté, d’être fasciné par la Vie et de travailler à tenter de pénétrer son mystère, l’envie de vaincre, etc. Ne rien faire n’est donc pas envisageable. C’est pareillement vrai pour les collectivités. Alors, liberté et instinct de créativité, mais pas pour faire n’importe quoi.

Pour sauvegarder la liberté, la Vie ne pouvait que laisser à l’homme le soin de découvrir lui-même, individuellement et en collectivité, les lois universelles qui conditionnaient le bon développement du monde. Cette méthode hautement éducative ne fut pas retenue – sans doute pas comprise – par Moïse, grand maître du peuple hébreu sortant d’Egypte, puisque le livre de l’Exode, dans la Bible, nous relate l’épisode mythique de Dieu-Yahvé remettant à Moïse sur le Mont Sinaï les tables de la Loi qui, plus tard, devinrent le Décalogue – les « Dix commandements de Dieu ». La Vie et les religions ont des méthodes éducatives différentes.

Liberté, créativité… et amour

Nous créons par amour ; nous créons ce que nous aimons et nous avons besoin d’amour. C’est notre rêve : aimer et être aimé. Nous choisissons ce que nous aimons : conjoint, nourriture, habillement, distractions, métier ; nous nous regroupons par affinités. Dévouement, humanitaire, fraternité… L’amour est même le mobile qui anime l’évolution de notre personnalité : aimer nous conduit vers les autres, nous pousse à connaître leurs besoins, à échanger avec les autres – nous avons vu que vivre c’est échanger, pour l’homme comme pour le monde animal et végétal – ; amour de la culture, amour de l’art, amour du sport, amour de la nature… L’homme ne peut éviter l’amour car la Vie qui est en lui est amour, mais il demeure libre de lui accorder la place qu’il souhaite. On sait que l’amour est capable de tout, on sait qu’il finit toujours par triompher, alors jusqu’où l’amour conduira-t-il l’évolution du monde ? Bien entendu, pas de réponse possible à cette question. Nous pouvons toutefois être sûrs que l’amour triomphera de plus en plus dans nos sociétés ; n’est-il pas davantage présent aujourd’hui qu’il y a quelques siècles ?

Religion, laïcité, dualité

La laïcité, c’est le respect de toutes les opinions et croyances à connotation religieuse et philosophique et, en contre partie, l’obligation pour les institutions traitant de ces dernières de rester en dehors de l’exercice du pouvoir politique et administratif. Ce sont les religions qui prennent en compte ces opinions et ces croyances qui se réfèrent au divin. La religion se donne pour mission de relier les hommes à Dieu, bien entendu au Dieu défini par les hommes fondateurs de ces religions. Dans nos sociétés, il y a ce qui a trait aux hommes entre eux, et ce qui a trait aux hommes dans leur relation au divin. Il semble bien qu’une certaine dimension « religieuse » soit innée chez l’homme ; les religions ne feraient que la prendre en compte, ou, peut-être dans certains cas, exploiteraient ce besoin. Dans la relation des hommes entre eux, en plus du laïc et du religieux, nous retrouvons encore une dualité : la Droite et la Gauche, comme il y a dualité entre les hommes et la divinité, et aussi entre les religions. Le principe de la dualité se retrouve en toutes choses, c’est le moteur du développement, y compris dans le sport où le sportif rencontre la résistance de l’air, de l’eau, etc. L’avion qui vole symbolise parfaitement cette dualité universelle et son rôle puisque c’est la résistance de l’air, son opposition, qui lui permet de voler, d’aller vers. Et puis, tout homme ne voudrait-il pas être autre que ce qu’il est ? C’est encore une autre dualité, une pression pour davantage de développement.

Bien entendu, cette dualité, moteur de développement, peut, en tous domaines, être conduite en connaissance de cause, avec intelligence, amour et délicatesse, ou avec brutalité sans compréhension, en ignorant ce processus et sa finalité. C’est un grand art que celui de maîtriser la dualité, de la rendre à son rôle de développement. Avec la dualité, nous touchons ici à la connaissance psychologique la plus utile pour tous les éducateurs. Et qui n’est pas « éducateur » dans un domaine ou dans un autre de notre monde ? Éduquer, c’est aider l’individu à aller au-delà de ce qu’il est.

Vers où aller ?

Autrement dit, que pouvons-nous retirer, pour la gestion de notre existence, de l’observation des manifestations de la Vie en nous et dans la Nature ? Où va l’évolution que la Vie poursuit dans l’Univers depuis 15 milliards d’années, et depuis 4, 5 milliards d’années sur notre planète ? Que veut réaliser la Vie ? Quel savoir-faire est le sien ? D’où proviennent les aspirations qui se développent en chacun de nous et qui nous entraînent chacun dans nos directions ?

Il est important de répondre à de telles questions. Oh ! non pas d’un seul coup, non pas une fois pour toutes, mais très souvent au cours de notre existence, chaque fois que nous rencontrons un problème, chaque fois que devons choisir. Et si notre réponse n’est pas bonne, la Vie se chargera de nous le faire connaître. La Vie veut bien que nous allions dans des impasses, mais elle ne souhaite pas que nous y restions. Pas de stagnation.

Toutefois, sachons bien que l’existence n’est pas une longue ligne droite, mais bien davantage une succession d’expériences et de tâtonnements. Si la ligne était droite, elle devrait être tracée clairement à l’avance, imposée, sans dérogations possibles, chacun suivant la même piste, donc sans liberté. Et nous l’avons vu, sans liberté pas de créativité et adieu la richesse de la diversité, point donc d’évolution. Le plus précieux pour la Vie est bien la capacité créative de chaque être humain, créativité qui œuvre au développement de la pensée et débouche également dans la transformation de la matière. Mais il n’y aurait rien d’autre que notre instinct s’il n’y avait en chacun de nous ces exigeantes aspirations supérieures qui nous renvoient une sorte de modèle à réaliser. D’où vient ce passé de l’Univers et son futur qui seraient en nous, ce que les psychologues appellent l’inconscient ? L’idéal est certainement de chercher à mettre en commun et à comparer ces manifestations pour en dégager le sens et une mise en pratique. Sans doute, s’agit-il là de la part de « religieux » qui serait en nous en vue d’un large développement à venir dans le cadre de l’évolution de l’Univers ?

Pour la Vie, chaque individu n’a de sens que par son appartenance à une espèce. L’individu seul ne pourrait même pas survivre, et, sans le concours et la collaboration des échanges, aucun progrès ne serait possible, d’ailleurs, déjà pour naître, tout individu est le fruit d’une double rencontre. Mais il y a plus, nous ne pouvons imaginer un arbre unique, il n’a de sens que par rapport à la forêt, forêt qui, en outre, permet la diversité des arbres. Il en est de même des ruches d’abeilles ou des fourmilières. C’est le tout qui a un sens et permet la survie et la croissance de chaque individu. La Vie a assuré l’organisation de ces espèces par l’instinct, tandis qu’elle a confié celle de l’espèce humaine à la pensée assortie d’une part importante de liberté créative pour chaque individu. La difficulté est que nos sociétés doivent développer cette diversité et veiller, en même temps, à ce qu’elle demeure toujours au service de tous. Et là, nous retrouvons la croissance par les expériences, dialectique universelle et éternelle. C’est cette créativité-croissance de l’homme qui doit s’accorder à celle de la Vie. Nous pouvons en dégager le principe : respecter les équilibres naturels par l’intelligence humaine et la loi d’amour universel en tenant compte du principe de la dualité animateur de la croissance. Et il ne s’agit pas seulement des équilibres naturels de la Nature, mais également de la justice humaine, de l’entraide, de l’égalité des chances afin de réduire les tensions excessives entre individus et nations. Sans de tels principes ni les écologistes ni les partis politiques de gauche ne réussiront à bâtir des programmes crédibles.

Mais il y a plus : changeons le pouvoir politique qui entraîne le peuple et fait les lois s’il ne nous convient pas. Il faut alors modifier la philosophie de la vie de la majorité des citoyens car les hommes politiques sont les représentants des populations, issus du peuple, choisis par le peuple, la plupart du temps en de nombreuses étapes progressives du local au national. Sont également issus du peuple tous nos personnels revêtus d’autorité ou de compétences : juges, policiers, enseignants, médecins… Un seul moyen : la création d’associations qui peu à peu agiront comme un levain dans les nations : associations militantes pour l’écologie, pour réapprendre à faire le pain, pour réapprendre à cultiver les légumes, pour une commercialisation plus saine et plus économique des produits de la terre, pour la santé, pour l’enseignement, pour les loisirs, pour un mieux vivre en ville, pour la revitalisation de nos villages construits jadis pour répondre aux besoins d’échanges et d’entraides, etc. Travail associatif de longue haleine, mais combien rapidement confortable. Sinon les places seront toujours occupées par les exploiteurs du peuple et leurs délégués ou par des arrivistes sans scrupules.

Allons-nous vers une autre civilisation ?

La réponse est oui. Depuis plus de cinquante ans les grands rêves de l’Occident se sont effondrés, et à quelle vitesse ! : hitlérisme, colonialisme, communisme, socialisme, christianisme, et notre capitalisme vit une véritable agonie. L’Occident est devenu incapable de se renouveler, et il succombe face aux jeunes vitalités des pays émergents… qui connaîtront d’ailleurs le même sort que nous s’ils copient notre capitalisme sauvage. Produire rapidement et en très grandes quantités, comme nous savons le faire désormais, doit trouver en bout de chaîne une consommation de toute cette production. Or la consommation est limitée par le pouvoir d’achat et par la « fatigue » du consommateur. Le capitalisme sauvage est un bulldozer destructeur qui avance en détruisant jusqu’à son client et son consommateur d’hier après les avoir rendus exsangues financièrement. Sans cesse, il avale ce qu’il a réduit au préalable à sa plus petite dimension. Pour survivre, nous avons dû, en France, offrir à ce capitalisme un prêt ( ?) de 1 500 milliards d’euros, soit une dette de 26 000 euros par citoyen ! Il en est de même dans plusieurs pays. Et la mondialisation est en train de donner l’assaut final à notre Occident, cette mondialisation que nous avons provoquée, accélérée, par notre colonisation, par nos guerres, par le développement considérable de nos moyens de communication, par les images de notre télévision et de notre internet, par notre tourisme, etc. Nous devons maintenant songer à organiser cette unité planétaire, un peu comme hier nous avions dû fédérer les provinces en nations.

Mais ce n’est pas simple d’inventer le monde de demain. Le capitalisme ne parvient pas à juger utile la nécessité pour lui d’équilibrer production et consommation : il accumule toujours davantage l’argent dans ses banques et dans ses outils de production et de distribution tout en réduisant à la pauvreté des couches de plus en plus nombreuses de la population… qui ne peuvent donc acheter ce qui est produit. La dualité engendre ici un gaspillage au lieu d’être un moteur de développement de l’humanité.

Et, pendant ce temps, le pouvoir dirigeant clame qu’il faut travailler plus pour gagner plus, alors que le chômage est toujours là, paniquant les populations, et que les emplois sont de plus en plus précaires. On crée à la hâte nouveaux modèles et nouveaux robots car affrontements mortels entre grands à l’internationale l’exigent ; cadre et main-d’œuvre s’essoufflent alors à tenter d’intégrer sans cesse les toujours nouvelles technologies qui engendrent sans cesse le stress, détériore la santé et crée de nouveaux chômeurs. La Droite des partis politiques disparaît puis revient, par désespoir des citoyens. La Gauche, depuis plus de cinquante ans, ne parvient pas à mettre au point un programme crédible de gouvernement que le pays accepterait. On en vient de plus en plus à créer de vastes chantiers davantage pour satisfaire de grands groupes financiers et pour tenter de camoufler l’augmentation du chômage que pour répondre aux besoins les plus urgents des populations. Etait-ce vraiment le meilleur choix pour le bonheur de l’humanité de relier les grandes villes de province à la capitale à la fois par une route nationale, par une ligne de chemin de fer, par une autoroute, par une ligne TGV et par une liaison aérienne… alors que les technologies de pointe libèrent les hommes de plus en plus des astreintes du travail ? C’était un exemple. Le peuple a toujours les représentants qu’il mérite : ceux qui représentent ce qu’il est, ou bien ceux qui, par leurs abus, vont le réveiller. Pourquoi un tel emballement en si peu de temps ? Pourquoi cette fuite vers le mur de la complication à outrance ? La Vie ferait-elle faillite au stade de l’humanité ? Ou bien l’humanité traverse-t-elle une crise de croissance, ou bien se trouve-t-elle face à une victoire qu’elle ne sait pas utiliser ? La situation actuelle a certainement un sens. Excellente occasion d’en discuter en groupes.

Conclusions

Je voudrais terminer cet essai de réflexion par un exemple personnel qui montre la complexité du problème, l’enchaînement des situations : Pendant l’Occupation allemande de 40-45 j’étais jeune ouvrier agricole. Comme un grand nombre d’hommes étaient prisonniers en Allemagne durant six années, les travaux agricoles étaient en charge des jeunes et des anciens. Je disposais de trois chevaux pour faire les travaux de la ferme, notamment les labours, la fenaison et les divers charriages. Le monde rural ne connaissait pas à cette époque la modernisation. Dès cinq ou six heures du matin, selon la saison, il fallait aller chercher les chevaux dans les champs où ils se trouvaient, quel que soit l’état du ciel ; puis les nettoyer avec étrille et brosse ; ensuite les harnacher et les atteler à l’engin choisi en fonction du travail à exécuter. A midi, il fallait les dételer, les nourrir et les abreuver. Le repas terminé, il fallait ré-atteler. Et le soir venu, dételer et reconduire les chevaux à leur pâturage. Bis repetita le jour suivant.

Quant au lendemain de la guerre les premiers tracteurs agricoles apparurent sur le marché et qu’en même temps une banque se spécialisa dans le crédit aux agriculteurs, les jeunes fils de fermiers les plus dynamiques, déjà fortement impressionnés et éveillés par la puissance du matériel motorisé des Alliés lors du Débarquement, comprirent très vite qu’un gain de temps et de confort considérables étaient promis par l’engin. Tourner tout simplement la clé de contact au lieu d’atteler les chevaux ! Et le sentiment de modernité et de puissance en prime ! De plus le tracteur portait son homme alors qu’il fallait marcher aux côtés des chevaux. Et l’engrenage d’un progrès sans relâche se mettait en marche. Après le tracteur, le matériel qui va avec, mais pour assurer la rentabilité de l’ensemble et payer les intérêts bancaires, vite on comprit qu’il fallait agrandir l’exploitation. On racheta les terres qui devenaient disponibles par abandon des plus anciens qui ne pouvaient suivre le progrès ou pour toutes autres raisons. Le matériel devenant de plus en plus puissant réclamait de plus vastes espaces et conduisit au « remembrement » des terres, erreur de précipitation qui supprima les haies protectrices édifiées par les anciens. Et, aujourd’hui, seulement cinq ou six décennies après, le monde agricole traverse une crise sans précédent le contraignant à la pauvreté, à l’endettement, aux manifestations et aux grèves. Oui, il fallait, par la mécanique, libérer le paysan de la dureté de certaines travaux ; l’homme, pour la Vie, c’est d’abord la pensée, et il faut favoriser son essor, alors où est la faute ?

Quand le tracteur arriva… mais aussi quand le réfrigérateur arriva… quand la machine à laver arriva… quand le boum de l’électroménager arriva…quand l’automobile pour tous arriva… quand la télévision arriva… quand l’internet et le téléphone mobile arrivèrent… c’était toujours pour libérer l’homme, pour gagner du temps, pour devenir plus compétitif, pour se consacrer à des emplois plus rentables, etc. Mais le capitalisme veillait ; il savait libérer l’homme dans un domaine pour mieux l’exploiter dans un autre. Sans doute, un grand nombre d’entre nous vit mieux, mais pareillement un grand nombre – les silencieux – vit très mal… alors que la richesse produite est de plus en plus importante. Il est certain que nous nous laissons prendre à ce progrès libérateur, faussement libérateur, pourtant il est difficile de toujours dire non. Difficile de dire non même au crédit qui a provoqué depuis les actuelles dettes dramatiques des nations, mais ne fallait-il pas encourager l’achat de ce qui était produit ! Où est l’erreur ? Comment réguler cette course à la production qui entraîne une course à la consommation pour les uns et un désespoir pour les autres ? Il semble évident qu’il faille réorienter les richesses produites vers des destinations plus utiles à l’humanité. Quelle autre civilisation pour demain ?

Tous droits réservés Ferdinand David

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